Norbert Thierion

Publié le novembre 20, 2016 dans Personnages

Norbert Thierion

Norbert Thierion, prieur Curé de Jouy et de Corniéville (Meuse) de 1694 à 1727 est né vers 1641 et il est décédé le 26 juillet 1727 à Jouy sous les Côtes âgé de 86 ans.

En 1700, Norbert Thierion, prieur curé de la paroisse de Jouy sous les Côtes, ouvre un nouveau registre en indiquant sur la première page qu’il l’a “ commencé la 6ème année de la desserte de Jouy et de Corniéville ”.

Les actes qu’il a enregistrés dans ce registre pendant près de trente ans, ont été souvent agrémentés de commentaires originaux et surprenants.
Les actes de décès sont les plus instructifs, car si la cause supposée ou les circonstances du décès sont fréquemment mentionnées, on trouve aussi parfois l’opinion du curé sur la conduite du défunt pendant son « séjour mortel » dans sa paroisse.

En 1721, un différent à propos de la propriété d’une cloche qu’il a fait fondre et refondre à ses frais, l’oppose à ses paroissiens. L’histoire de la querelle autour de cette cloche est racontée en deux pages complètes dans ce registre.

Voici quelques actes de décès représentatifs de la rédaction originale de Norbert Thierion que j’ai retranscrits dans cette page.

Les effroyables accouchements de Marie de la Croix

Le 2e novembre 1705 jay enterré une fille de Toussaint Vivin manoeuvre de ce lieu et de Marie la Croix son épouse laquelle a été batisée par la sage femme dans le ventre de sa mere parce quil paressoit impossible de la pouvoir tirer heureusement de ce cachot, comme en effet on ne la pu tirer sans luy arracher un bras et toutefois pour etre encor en vie apres avoir été tirée comme miraculeusement la mere aiant été en un extreme danger de la sienne comme jen ay été moy meme témoin aiant donc été assuré du bateme de la fille tant par le pere et les grandes meres de l’enfant comme aussy quelle étoit en vie, que par la dite Marie Gardiennet et par d’autres qui y étoit présents, jay inhumé la fille dans le cimetiere de cette paroisse le dit jour en presence dun grand concours du peuple et particulierement du dit Vivin pere et de la dite Gardiennet qui a signé avec nous et le dit Vivin fait sa marque.

Le 24e fevrier 1711 Marie de la Croix epouse de Toussaint Vivin aiant eu toute sa vie des couches tres facheuses et malheureuses est morte enfin elle et son enfant a ces dernieres couches, elle auroit été la veille confessée comme pour se préparer a la mort, apres les tristes experiences de ses couches précedentes, et en mourant elle a eu comme on croit l’extreme onction dans la surprise brusque ou on fut. son enfant qui fut démembré par Mr Maillart habile chirurgien n’aiant pu autrement etre tiré ny meme arraché de son corps fut par luy batizé, et l’un et l’autre ont été par moy ce lendemain inhumés et unis dans une meme fosse n’aiant pu etre separes vivans, dans le cimetiere de cette paroisse vis a vis de l’autel du Rozaire.

La mort d’un curieux paroissien

Le jour de la grande feste du St Sacrement trente may 1709 Humbert Caillot aagé de plus de 80 ans est mort apres avoir fait plusieurs differens personnages pendant une vie fort infortunée riche d’abord tres pauvre ensuite, libertin et dissolu pendant sa jeunesse, paresseux dans laffaire du salut de sa viellesse: usant mal de ses biens en suivant ses passions; mais flagellé de Dieu par un decret qui l’a dépouillé de tout, et reduit le reste de ses jours a la faim, a etre rongé de vermines et a souffrir la derniere mendicité, qui l’auroient sans doute parfaitement purifié et sanctifié, sil avoit recherche le ciel avec ardeur apres avoir esté trompé du monde. mais par malheur il a vecu depuis ce changement de fortune, non dans de grands crimes mais dans une si grande négligence de son ame quil ne se confessoit presque jamais qua pasques quelques corrections et exhortations que luy put faire son pasteur. enfin il a eu ce qu’on luy avoit predit cest a dire quil est mort sans sacremens et meme sans avoir fait ses pasques: cest pourquoy la terre Ste luy seroit interdite sil ne mavoit donne de bons sentimens, sil n’avoit témoigné plusieurs fois quil vouloit se confesser qu’etant obligé d’aller mendier ailleurs, son absence frequente du lieu l’auroit retenu de s’approcher des sacremens a cause du mauvais etat ou il etoit, et surtout si l’on ne mavoit assuré que le jour d’hier veille de sa mort au soir, il n’avoit témoigné quil n’attendoit que ??? pour sacquitter de ce devoir mais par malheur il a été surpris ainsy apres ces bons sentimens, jay eu pitié de luy, et jay cru meme que je devois luy accorder la sepulture eclesiastique ce que jay fait le meme jour. 30 may 1709.

Norbert Thierion

Norbert Thierion

Les limites de la médecine du 18è siècle

Le 22e aoust 1718 Jean Bataille jeune homme d’esprit et de bonne espérance, apres avoir purifié son ame par de longues et vigoureuses douleurs ausquelles hypocrate ne conaissoit rien, et que les eaux de plombieres n’ont pu guerir, qui le retenoient le plus souvent au lit et ne le laissoient quelque peu sortir qu’avec des crosses, s’etant amassees en une grosse tumeur qun chirurgien a tenté denlever par incision, mais cela n’aiant servi qu’a avancer sa mort, il est allé au grand medecin rendre compte et se mettre en etat d’etre bien reparé pour sa resurrection. il est mort a Euville ou l’on avoit conduit pour etre plus pres du chirurgien et le lendemain 23e du meme mois, il a été ramené a Jouy sa paroisse, et a été par nous inhumé. il a laissé une jeune femme et de petits enfans.

Mort d’un coup de pied de cheval

L’an mil sept cent le 18e du mois de juillet est décédé dans cette paroisse Claude Lagravière mary de Lucie Mauriot aagé de 46 ans Maire du Seigr de Jouy. laquelle mort est arrivée par un coup de pied de cheval, il a été confessé et receu l’extreme onction, mais il n’a pu recevoir le viatique tant parce qu’il vomissait d’abord que parce qu’il tomba ensuite par le coup dans une forme d’apoplexie jusqu’à son décès. son corps a été inhumé avec les céremonies ordinaires dans l’eglise de cette paroisse entre la chaire du prédicateur et le pilier tirant aux fonds le lendemain dix neuf juillet en présence de tout le peuple et particulièrement de Nicolas Gravière son fils, Francoise Graviere sa fille et Nicolas et Laurent Gravière frères du deffunt qui ont signé avec moy, la dite Mauriot, sa veuve ne sachant signer.

Les éternelles épousailles

Le 6e fevrier 1708 Anne Errard fille de Joseph Errard tonnelier et de deffunte …. Bailli aagée d’environ vingt ans au lieu de prendre un époux mortel a quitté ce séjour trompeur et contagieux pour aller célebrer d’eternelles epousailles avec le Roy des epoux JCH apres avoir passé par son jugement qui luy aura été sans doute favorable eu égard a la vie innocente et chrétienne quelle a meinée et le lendemain sept du meme mois elle a été par nous enterrée dans le cimetiere commun jusqu’au jour de la resurrection.

La fin de vies difficiles

Le 19e aoust 1720 jay enterré dans notre cimetière Laurent Lagraviere après avoir receu tous ses sacremens avec devotion et apres avoir essuier de grandes vicissitudes a fait beaucoup de personnages en cette vie.

Le 12e decembre 1722 Christine Lhermite epouse de Nicolas Lagraviere laboureur a terminé son exil et le pelerinage de cette vie plaine d’eccueïls facheux pour entrer dans celle qui est d’une durée éternelle par consequent d’un sort infiniment perilleux ce quil y a de bon augure pour elle cest qu’elle a vecu dans une simplicité colombine et dans une conduite fort chrétienne qui a été couronnée d’une mort pieuse et tranquille avec la reception de tous les sacremens.

Des maladies et des douleurs

Le 30.12.1717, Jean Thiriot charon, après avoir été longtemps affligé d’une grosse enflure en forme d’hydropisie et avoir emploié tous les remèdes imaginables pour s’en guérir, le dernier dont il s’est servi lui été si funeste qu’au lieu de le soulager il lui a augmenté ses douleurs et donné promptement le coup de la mort qu’il a reçue avec beaucoup de résignation et de piété avec le secours qu’il a eu de tous les sacremens et même avec l’application de l’indulgence plénière accordée à l’article de la mort aux confrères du Saint Rosaire aiant le bonheur d’avoir été enrôlé dans cette belle confrérie de la Sainte Vierge et le lendemain il a été par moy inhumé dans notre cimetière.

L’an mil sept cent un le seize mars est décédé dans cette paroisse Pierre Bailly laboureur aagé d’environ soixante dix ans mary de Marie L’Hermitte lequel n’étant détenu au logis que par un mal à l’orteil du pied a été frappé d’une subite apoplexie qui luy a oté les sens et toute connessance, ainsy il n’a pu recevoir que l’extreme onction précédée d’une absolution. Sur ce qu’il avait témoigné auparavant, témoigne souhaiter d’aller au phitot à l’église recevoir les Saints Sacrements. Lequel Pierre Bailly a été le lendemain par moy inhumé dans la partie de nostre cimetière qui regarde la rue assez près du charnier en présence de la plupart de la paroisse particulièrement de Joseph Errard son gendre et des autres gendres du dit deffunt.

Le dix sept juillet mil sept cents deux dans le cimetière de cette paroisse Marie L’Hermitte aagée d’environ soixante et treize ans veuve de deffunt Pierre Bailoy laboureur de cette paroisse a été par moy enterré après avoir esté longtemps exercé par une facheuse maladie et après avoir dévotement reçu tous les Saints sacrements en présence de tous ses parents et de la populace.

Empêchement dirimant au mariage

Mariés sans dispense de consanguinité, les conjoints auraient pu vivre ensemble en promettant de rester comme frère et sœur sans se toucher jusqu’à l’obtention de la dispense requise. Etonnant, non ?

Le 13e janvier 1709 Jean Gergoine veuf de deffunte Elisabeth Caillot s’est fiancé suivant les ceremonies de l’eglise avec francoise Lallemand fille de Charles Lallemand et de deffunte Marie Grosjean et se sont mutuellement promis de se marier au plus tard dans quarante jours en présence du dit Charles Lallemand d’Antoine Langlez, de Nicolas Lallemand, Jean Caillot et Nicolas Grosjean et après en avoir publié les trois bans pendant le prosne de trois dimanches consécutifs savoir les 20, 27 janvier et 3e février, tout etant disposé pour ce mariage et le 5e de la dite année 1709, étant prest de le celebrer, il s’est trouvé par une révelation trop tardive que la dite francoise Lallemand étoit parente avec ladite deffunte Elisabeth Caillot entre le 3e et le 4e degré de consanguinité par conséquent alliée au dit Jean Gergoine au meme degré d’affinité ce qui met entr’eux un empechement dirimant dont Monseigneur a pouvoir de dispenser, ainsy comme le temps pousse, que tout est prest et que le retard causeroit de grands interets, en l’absence de Mondit seigneur jay consulté Mr l’abbé de Rangeval docteur et les religieux prieur et régent de théologie savoir si en ce cas je ne pourrois pas passer outre, en faisant prester serment a ces deux allies quils ne se toucheront point et quils vivront ensemble comme frere et soeur jusqua ce quils aient obtenu la dite dispense quils iront poursuivre et impetrer incessamment pour me la remettre entre les mains, mais la dite consulte ne trouvant pas cet expedient assez sure pour une alliance aussi forte jay été obligé d’envoier a Toul le dit Gergoine aupres de Mgr avec un arbre de ligne que jay dressé, d’ou apres beaucoup de paine et de temps, on m’a rapporté la dispense de Mgr et une sentence de Mr l’official de Toul dont voicy un extrait.
L’official de Toul au sieur curé de Jouy salut en Nre Sgr JCH veu la dispense accordée ce jourd’huy par Mgr l’Eveque a Jean Gergoine veuf de deffunte Elisabeth Caillot et francoise Lallemand vos paroissiens laquelle nous a été renvoiée pour informer des faits sur lesquels la dispense a été accordée, savoir qu’ils sont parens du troisième au quatrième degré d’affinité, et que la dite Lallemand et le dit Gergoine auroient paine a trouver a se marier de partis sortables autres que leurs parens ou allies, soit a cause de la petitesse du lieu, soit a cause des enfans dont le dit Gergoine est chargé de son 1e mariage, et enfin qu’ils ne sont pas en etat de recourir a Rome … veu aussy l’arbre de ligne des parties avec notre proces verbal en forme de lettre adressé a Mgr par lequel tous les faits cy dessus se trouvent justifiés. Nous vous mandons de leur donner la benediction nuptiale en execution de la dit dispense apres la publiation d’un ban seulement, les dispensons des deux autres nonobtant l’empechement dirimont resultant du 3e au quatr° degré d’affinité auquels ils se trouvent parens et sur lequel ils ont été dispensés par Mondit Sgr. donné a Toul le 15e de juin 1709
signé De laigle avec le sceau de l’officialité et a costé C.Beguin
En execution du mandement cy dessus jay publié un ban et déclaré dispense des deux autres de mariage futur entre Jean Gergoine veuf de deffunte Elisabeth Caillot et francoise Lallemand fille de Charles Lallemand et de deffunte, et déclaré en meme temps quils ont obtenu dispense du 3e au 4e degré d’affinité pendant la messe de paroisse du dimanche 16e juin 1709.
et le 18e du meme mois de juin 1709 jay procédé a la celebration de ce mariage et jay receu le consentement du dit Jean Gergoine et de la dite francoise Lallemand par lequel ils se sont mutuellement fait la ????? leur ay donné la benediction nuptiale suivant les ceremonies de l’eglise en présence de Charles Lallemand.